La médiation animale à l’IME La Bourguette

La médiation animale à l’IME La Bourguette

Pendant cette période de crise sanitaire inédite, la Fondation Adrienne et Pierre SOMMER a souhaité donner la parole aux acteurs de la médiation animale pour connaître leur quotidien . La fondation recherche à mettre en valeur les établissements qui continue la médiation animale malgré le contexte sanitaire actuel. Elle a imaginé que cela pouvait se faire sous forme de petites vidéos courtes qui seront mises en ligne sur leur site. L’atelier cheval de l’IME La bourguette, soutenu financièrement par la Fondation, a participé à ce projet
et nous vous laissons découvrir le petit reportage réalisé par des équipes motivées et impliquées en cliquant ici.

La médiation animale:

L’IME La Bourguette est le premier établissement ouvert par l’Association, il est situé sur la commune de la Tour d’Aigues, occupant un domaine agricole préexistant dont il a repris le nom. La ferme se situe sur un terrain de 35 hectares dont 14 hectares cultivables. A l’extrémité du domaine, dans la forêt à environ 500 mètres du corps de ferme, une ancienne bergerie à demi-troglodyte accueille l’activité cheval (salle d’accueil des enfants, sellerie) et les infrastructures (carrière, rond de longe, parcs).

Depuis la création, les chevaux ont été présents en lien avec l’agriculture c’est-à-dire la nature, les saisons: c’est le rythme du vivant qui est mis en lumière, et aussi du temps qui est scandé.

D’autres part, ils sont aussi un outil de travail exceptionnel lorsqu’il est question de la communication des autistes. C’est pour quoi depuis 2009, l’IME La Bourguette a construit autour de cet animal, une activité spécifique pour répondre au besoin de ces enfants qui ont la possibilité d’expérimenter, d’explorer un autre monde. Les animaux peuvent, dans certains cas, venir enrichir les acquis des personnes autistes, en offrant des expériences sensorielles variées, notamment sur le plan tactile et en l’aidant à investir l’espace, pouvant même représenter une motivation pour effectuer certains mouvements difficiles lors de troubles moteurs. Ils peuvent aider à mieux appréhender la notion de temps, en le structurant par le biais des différents soins réguliers qui leur sont prodigués. Enfin, ils représentent un point de repère stable et arrivent quelquefois à détourner l’individu autiste de ses préoccupations et stéréotypies.

La grande taille du cheval impose quelque chose qui est aussi intéressante. En effet, malgré cette stature, celui-ci n’a pas de rapport de pouvoir ni d’autorité vis à vis des enfants à la différence de la relation avec les adultes. D’autre part, le cheval n’est pas aux prises avec des émotions qui font partie du monde, du quotidien des humains, des relations inter-humaines. L’autiste, très attentif au langage non verbal se rend compte des situations ambigües de la communication qui sont compréhensibles pour lui car non décelables de par ses troubles autistiques. Aussi, l’animal qui ne parle pas et qui, par conséquent, n’inonde pas l’individu autiste d’informations difficiles à traiter permet une communication différente sur un autre mode sensitif et intra-verbal. Également, ne répondant pas quand on s’adresse à lui, l’animal laisse donc l’individu autiste s’exprimer lorsqu’il en a le désir. Le cheval ne riposte pas toujours en cas de violence, il reste statique ou s’éloigne.

Le mode de communication des chevaux convient au mode de communication des autistes. en effet, l’approche du cheval se déroule le plus souvent non de face mais de côté, par l’odorat et le contact physique.

L’IME possède des animaux au tempérament calme et aux comportements généralement prévisibles, laissant la possibilité de travailler autour de l’apprentissage de la notion de schéma corporel, par l’intermédiaire du contact physique avec l’animal, ainsi que la socialisation et la communication, à la fois gestuelle et verbale.

Base théorique et fonctionnement de l’activité :

L’option de travail à l’IME autour des chevaux, poneys et ânesses de l’atelier avec les enfants que l’on accueille est celui de l’animal comme médiateur, c’est-à-dire l’animal comme facilitateur, comme passerelle. En effet, cela permet un fonctionnement triadique entre l’enfant, l’animal et l’éducateur. L’importance est donnée à la qualité de la relation entre les trois protagonistes qui y participent par l’échange de messages relevant de 3 registres : verbaux, non-verbaux et infra-verbaux.

Le travail est composé principalement de mises en situation avec le cheval dans l’espace spécifique de l’atelier, incluant « la bergerie » (cabanon assez confortable quoiqu’à demi-troglodyte), le fenil, la carrière et les différents espaces de pâturage des animaux.

L’apprentissage est expérientiel permettant à l’enfant, par la proximité et le toucher du corps du cheval, de mieux percevoir, discerner et comprendre le corps de l’animal. Les limites du corps de l’équidé permettent à l’enfant autiste de rencontrer ou de ressentir ses propres limites corporelles.

Ce travail s’effectue souvent à pied, sans monter, dans les soins quotidiens que l’on prodigue aux animaux, c’est-à-dire en marchant côte à côte auprès d’ânesses, des poneys et des chevaux, en les nourrissant, en les pansant, en les brossant, en curant leurs sabots.

La relation enfant/cheval est également un outil efficace pour la communication infra verbale et l’enfant autiste peut souvent se reconnaître dans cette communication directe, archaïque.

Le fait que les équidés vivent dans un monde sensoriel différent du nôtre, qu’ils soient très émotifs et sensibles, permet l’établissement d’une relation avec l’enfant. Celle-ci est ensuite source d’une dynamique selon les ressentis de l’animal et de l’enfant autiste, aidant alors celui-ci à révéler ses émotions brutes dans un échange mimétique dans « l’ici et maintenant », non parasité par le désir de l’autre (qui caractérise les relations entre humains) car les équidés ne sont pas dans une logique de désir de l’autre ».

Le cheval observe ceux qui sont autour de lui et selon la communication, la confiance, la présence des autres, il va se montrer indifférent ou au contraire attentif, s’éloigner ou aller au-devant des enfants. La communication est essentiellement infra verbale, l’animal repère surtout la posture du corps, les gestes, le regard, la voix avec, par exemple, son intonation, le niveau d’assurance, qui sont les principaux éléments de cette communication.

Ainsi auprès des équidés, une multitude de choses va se passer, le travail de l’éducateur responsable de l’atelier est d’accompagner l’enfant et de traduire ce que celui-ci peut ressentir en présence du cheval, à son abord, ainsi que de traduire le comportement ou l’attitude du cheval en réponse au comportement de l’enfant.

Auteur: Sandra DE FALCO, monitrice-éducatrice, monitrice d’équitation spécialisée equi handi (BFEEH) et chargée de projet en médiation animale, IME La Bourguette.